Comment �chapper � la r�cession? Cette question hante jour
apr�s jour les esprits des dirigeants d'entreprises, tandis
qu'ils doivent faire face aux al�as de la conjoncture. Quels
sont donc les moyens de passer ce cap difficile, tout en d�veloppant
ses affaires? L'histoire montre que ce sont souvent les entreprises
les plus dynamiques, les plus innovantes et les plus flexibles
qui tirent leur �pingle du jeu. Mais comment favoriser de
telles strat�gies par les temps qui courent? L'intrapreneurship
est un nouvel outil qui permet justement de stimuler l'innovation
et les comportements entrepreneuriaux dans les entreprises,
notamment dans les grandes structures (multinationales, administration
publiques, organisations internationales et non-gouvernementales,
institutions universitaires et PME).
A l'occasion d'un First Tuesday consacr� � l'intrapreneurship
ce soir � Gen�ve (lire �galement encadr�), l'agefi a rencontr�
l'un des intervenants en la personne de Rapha�l Cohen, directeur
du certificat en entrepreneurship/intrapreneurship de HEC
de l'Universit� de Gen�ve.
Qu'est-ce que l'intrapreneurship?
C'est le mode de "l'innovativit�" en entreprise, c'est-�-dire
exploiter et multiplier le potentiel cr�atif de l'ensemble
du personnel. Car si la plupart des soci�t�s ont appris �
g�rer les flux mat�riels, financiers, voire l'information,
elles n'exploitent, par contre, pas pleinement les capacit�s
d'innovation de leurs collaborateurs. Or une entreprise innovante
se dote de davantage de chances de tout � la fois d�gager
de meilleur taux de croissance, d'optimiser sa strat�gie de
d�veloppement et de mieux r�sister aux coups de vents sur
les mar ch�s ou sur son cours de Bourse.
Est-ce r�ellement un moyen d'�chapper
� la r�cession? Il existe deux attitudes en ces temps
de conjoncture �conomique difficile: soit on coupe les branches
mortes et on se recroqueville, soit on est proactif en plantant
et semant pour pr�parer l'avenir. Il n'y a que par l'innovation
que l'on peut se diff�rencier de ses concurrents. Car, � l'inverse,
on assiste � une guerre des prix o� personne n'est gagnant,
si ce n'est le client final. La d�marche intrapreneuriale
a en plus un effet tr�s favorable sur la motivation des collaborateurs,
et intervient comme un puissant moyen de fid�lisation.
L'innovation n'est-elle que technologique?
Non, l'innovation est possible dans tous les domaines d'activit�.
Elle peut concerner le d�veloppement et la commercialisation
de nouveaux produits, les relations avec les clients, l'am�lioration
des processus, de nouveaux services, de nouvelles mani�res
de communiquer, etc. L'intrapreneurship est une d�marche qui
vise � encourager la prise d'initiatives et l'innovation,
quelles qu'elles soient, pour transformer les collaborateurs
en agents du changement.
A qui s'adresse une telle d�marche?
L'intrapreneurship concerne surtout la deuxi�me g�n�ration
de soci�t�s ayant pass� le cap du d�marrage, c'est-�-dire
les entreprises et les organisations d�j� �tablies. Les start-up
sont, quant � elles, encore dans un processus ant�rieur, celui
de l'entrepreneurship.
Est-ce une m�thode tr�s r�pandue?
Non, peu d'entrepreneurs en sont inform�s � l'heure actuelle.
Nous sommes dans une phase de sensibilisation. Mais je peux
vous dire que si l'on effectuait un sondage aupr�s des directeurs
d'entreprises, ceux-ci seraient assur�ment tous d'accord pour
que leurs employ�s adoptent un comportement entrepreneurial.
Paradoxalement, de nombreux chefs d'entreprises ont aussi
peur de la perte de contr�le qui pourrait en d�couler. Pour
ceux-ci, l'id�al se r�sumerait plut�t � des employ�s capables
de cloner les initiatives qu'ils auraient eux-m�mes prises.
Ce qui, �videmment, ne correspond pas au concept d'entreprendre
au sein d'une entreprise. En d'autres termes, les seules directions
� se lancer r�ellement dans ce processus sont celles qui ont
suffisamment confiance en elles. De plus, elles ont compris
que non seulement ces d�marches donnent la possibilit� aux
collaborateurs d'innover de mani�re � montrer de quoi ils
sont capables, mais qu'elles ouvrent aussi pour le b�n�fice
de l'entreprise. Prenez par exemple les r�sultats �tonnants
obtenus par Oracle. Les structures d'intrapreneurship mises
en place � l'�chelon mondial ont accru la motivation tout
en restant compatibles avec une direction centralis�e. Avec
quelques r�ussites comme celle-ci, l'�mulation devrait se
faire.
Quels sont vos moyens pour motiver
les patrons des autres entreprises? La question clef
consiste � identifier les strat�gies qui favorisent ces comportements.
Le d�fi est d'�viter la dispersion de l'innovation. L'intrapreneurship
apporte � l'entreprise des outils lui permettant d'�viter
le chaos r�sultant d'une innovation non focalis�e sur les
objectifs de l'entreprise. La direction peut ainsi s'assurer
qu'elle ne perdra pas le contr�le gr�ce, notamment, � une
grille d'�valuation et des garde-fous.
Jusqu'� pr�sent, pour encourager l'innovation, on se concentrait
sur les mesures structurelles. Or cela n'est pas suffisant.
Il s'agit avant tout de trouver des moyens de motiver l'innovation
et aussi des outils � sa r�alisation. Notre approche se focalise
donc sur trois incitations conjointes: motivation, outils
et conditions cadres. Cette combinaison semble tr�s performante.
Oracle a, par exemple, fait un bilan trois mois apr�s le s�minaire:
56% des participants du d�partement marketing avaient depuis
lanc� des initiatives suppl�mentaires. Ce qui est particuli�rement
encourageant, surtout lorsque l'on sait que ce r�sultat provient
d'un s�minaire unique.
Quels sont les outils pour mettre
en place une telle d�marche? L'intrapreneurship permet
de concilier les objectifs de l'entreprise avec ceux de l'individu.
L'outil essentiel c'est ce que l'on a appel� le WiiiFM, c'est-�-dire
"What is in it For Me?", ou comment vais-je en profiter personnellement?
Si la r�ponse � cette question existe, la motivation est au
rendez-vous.
De quelle mani�re proc�dez-vous?
Le but est d'encourager les collaborateurs � agir comme des
"intrapreneurs". Il s'agit donc de les inciter � identifier,
� analyser et � exploiter les opportunit�s d'am�liorer les
prestations de leur organisation. Avant d'impl�menter dans
l'entreprise ce "management by opportunity", nous analysons
d'abord les conditions cadres. Celles-ci doivent comprendre
notamment un certain nombre de m�canismes susceptibles de
lubrifier la machine comme, par exemple, une personne responsable
de l'innovation interne. Car la culture d'intrapreneurship
va au-del� de la seule gestion participative.
Lorsque les conditions-cadres sont adapt�es, nous formons
alors les cadres moyens-sup�rieurs durant deux � quatre jours,
afin de leur donner les outils n�cessaires pour concr�tiser
ce processus d'innovativit�. La suite est entre les mains
de l'entreprise qui doit assurer le suivi � l'interne. S'il
y a besoin d'un accompagnement externe, nous pouvons l'assurer.
Mais en aucun cas, nous ne tenons � devenir des consultants
externes. Il faut que l'entreprise vive son innovation de
mani�re autonome.
Est-ce � dire que l'intrapreneurship
ne concerne pas les employ�s?
Non, nous formons aussi les employ�s � cette d�marche,
mais selon des modalit�s compl�mentaires.
Quelles sont les limites de l'intrapreneurship?
La direction doit �tre pr�te � accepter les r�gles du jeu,
notamment le droit � l'erreur. Heureusement, une bonne utilisation
des outils du "management by opportunity" emp�che les erreurs
graves.
Qu'attendez-vous d'un �v�nement comme
ce First Tuesday consacr� � l'intrapreneurship? Des
�changes d'exp�riences intrapreneuriales, pouvoir apprendre
de toutes les personnes pr�sentes et, bien s�r, encourager
les personnes et les entreprises � utiliser l'intrapreneurship
comme moyen de d�veloppement. Il est aussi int�ressant de
noter que la plus grande partie des expos�s pr�sent�s ce soir
mettent en valeur des exp�riences au niveau des services,
et non pas des produits. Car, l'intrapreneurship c'est aussi
une vari�t� de mod�les: la Banque Cantonale de Gen�ve op�re
une mutation culturelle pour encourager les comportements
intrapreneuriaux; le site e-sider.com est, par contre, une
intraprise � l'int�rieur de la Banque Cantonale Vaudoise;
Agilent a d�lib�r�ment choisi, au moment du spin-off de HP,
d'�tre engag�e culturellement sur la voie intrapreneuriale.
Ces deux derniers cas sont totalement diff�rents des mod�les
qui ne modifient pas leurs structures de base. Autrement dit,
je souhaite que ce First Tuesday contribue � redonner un peu
de tonus entrepreneurial en Suisse.
Les intrapreneurs s'expriment au
First Tuesday
Dans le cadre des First Tuesday, un s�minaire est organis�
ce soir � Gen�ve sur le th�me de "l'intrapreneurship: pour
innover et entreprendre dans les grandes organisations". Des
experts et des praticiens confrontent leurs success stories
pour faire le point sur les derniers d�veloppements permettant
de stimuler les comportements entrepreneuriaux dans les grandes
et moyennes entreprises, ainsi que les administrations publiques.
Le panel verra s'exprimer Blaise Goetschin, CEO de la Banque
Cantonale de Gen�ve, Robert Pucci, DRH et Compensation & Benefits
Director Manager chez Agilent Technologies Europe, Alfonso
von Wunshchheim, CEO de e-sider.com (BCV), le professeur Beno�t
Leleux du S. Schmidheiny Professor of Entrepreneurship and
Finance, et Rapha�l Cohen, directeur du Certificat en entrepreneurship/intrapreneurship
de l'�cole des HEC de Gen�ve.
|