source : AGEFI 1 octobre 2002

Seule l'innovation permet de se diff�rencier A Gen�ve ce soir, First Tuesday consacre un s�minaire � "l'intrapreneurship, l'art de booster sa carri�re et son entreprise".

Sylvie Gardel

Comment �chapper � la r�cession? Cette question hante jour apr�s jour les esprits des dirigeants d'entreprises, tandis qu'ils doivent faire face aux al�as de la conjoncture. Quels sont donc les moyens de passer ce cap difficile, tout en d�veloppant ses affaires? L'histoire montre que ce sont souvent les entreprises les plus dynamiques, les plus innovantes et les plus flexibles qui tirent leur �pingle du jeu. Mais comment favoriser de telles strat�gies par les temps qui courent? L'intrapreneurship est un nouvel outil qui permet justement de stimuler l'innovation et les comportements entrepreneuriaux dans les entreprises, notamment dans les grandes structures (multinationales, administration publiques, organisations internationales et non-gouvernementales, institutions universitaires et PME).

A l'occasion d'un First Tuesday consacr� � l'intrapreneurship ce soir � Gen�ve (lire �galement encadr�), l'agefi a rencontr� l'un des intervenants en la personne de Rapha�l Cohen, directeur du certificat en entrepreneurship/intrapreneurship de HEC de l'Universit� de Gen�ve.

Qu'est-ce que l'intrapreneurship? C'est le mode de "l'innovativit�" en entreprise, c'est-�-dire exploiter et multiplier le potentiel cr�atif de l'ensemble du personnel. Car si la plupart des soci�t�s ont appris � g�rer les flux mat�riels, financiers, voire l'information, elles n'exploitent, par contre, pas pleinement les capacit�s d'innovation de leurs collaborateurs. Or une entreprise innovante se dote de davantage de chances de tout � la fois d�gager de meilleur taux de croissance, d'optimiser sa strat�gie de d�veloppement et de mieux r�sister aux coups de vents sur les mar ch�s ou sur son cours de Bourse.

Est-ce r�ellement un moyen d'�chapper � la r�cession? Il existe deux attitudes en ces temps de conjoncture �conomique difficile: soit on coupe les branches mortes et on se recroqueville, soit on est proactif en plantant et semant pour pr�parer l'avenir. Il n'y a que par l'innovation que l'on peut se diff�rencier de ses concurrents. Car, � l'inverse, on assiste � une guerre des prix o� personne n'est gagnant, si ce n'est le client final. La d�marche intrapreneuriale a en plus un effet tr�s favorable sur la motivation des collaborateurs, et intervient comme un puissant moyen de fid�lisation.

L'innovation n'est-elle que technologique? Non, l'innovation est possible dans tous les domaines d'activit�. Elle peut concerner le d�veloppement et la commercialisation de nouveaux produits, les relations avec les clients, l'am�lioration des processus, de nouveaux services, de nouvelles mani�res de communiquer, etc. L'intrapreneurship est une d�marche qui vise � encourager la prise d'initiatives et l'innovation, quelles qu'elles soient, pour transformer les collaborateurs en agents du changement.

A qui s'adresse une telle d�marche? L'intrapreneurship concerne surtout la deuxi�me g�n�ration de soci�t�s ayant pass� le cap du d�marrage, c'est-�-dire les entreprises et les organisations d�j� �tablies. Les start-up sont, quant � elles, encore dans un processus ant�rieur, celui de l'entrepreneurship.

Est-ce une m�thode tr�s r�pandue? Non, peu d'entrepreneurs en sont inform�s � l'heure actuelle. Nous sommes dans une phase de sensibilisation. Mais je peux vous dire que si l'on effectuait un sondage aupr�s des directeurs d'entreprises, ceux-ci seraient assur�ment tous d'accord pour que leurs employ�s adoptent un comportement entrepreneurial. Paradoxalement, de nombreux chefs d'entreprises ont aussi peur de la perte de contr�le qui pourrait en d�couler. Pour ceux-ci, l'id�al se r�sumerait plut�t � des employ�s capables de cloner les initiatives qu'ils auraient eux-m�mes prises. Ce qui, �videmment, ne correspond pas au concept d'entreprendre au sein d'une entreprise. En d'autres termes, les seules directions � se lancer r�ellement dans ce processus sont celles qui ont suffisamment confiance en elles. De plus, elles ont compris que non seulement ces d�marches donnent la possibilit� aux collaborateurs d'innover de mani�re � montrer de quoi ils sont capables, mais qu'elles ouvrent aussi pour le b�n�fice de l'entreprise. Prenez par exemple les r�sultats �tonnants obtenus par Oracle. Les structures d'intrapreneurship mises en place � l'�chelon mondial ont accru la motivation tout en restant compatibles avec une direction centralis�e. Avec quelques r�ussites comme celle-ci, l'�mulation devrait se faire.

Quels sont vos moyens pour motiver les patrons des autres entreprises? La question clef consiste � identifier les strat�gies qui favorisent ces comportements. Le d�fi est d'�viter la dispersion de l'innovation. L'intrapreneurship apporte � l'entreprise des outils lui permettant d'�viter le chaos r�sultant d'une innovation non focalis�e sur les objectifs de l'entreprise. La direction peut ainsi s'assurer qu'elle ne perdra pas le contr�le gr�ce, notamment, � une grille d'�valuation et des garde-fous.

Jusqu'� pr�sent, pour encourager l'innovation, on se concentrait sur les mesures structurelles. Or cela n'est pas suffisant. Il s'agit avant tout de trouver des moyens de motiver l'innovation et aussi des outils � sa r�alisation. Notre approche se focalise donc sur trois incitations conjointes: motivation, outils et conditions cadres. Cette combinaison semble tr�s performante. Oracle a, par exemple, fait un bilan trois mois apr�s le s�minaire: 56% des participants du d�partement marketing avaient depuis lanc� des initiatives suppl�mentaires. Ce qui est particuli�rement encourageant, surtout lorsque l'on sait que ce r�sultat provient d'un s�minaire unique.

Quels sont les outils pour mettre en place une telle d�marche? L'intrapreneurship permet de concilier les objectifs de l'entreprise avec ceux de l'individu. L'outil essentiel c'est ce que l'on a appel� le WiiiFM, c'est-�-dire "What is in it For Me?", ou comment vais-je en profiter personnellement? Si la r�ponse � cette question existe, la motivation est au rendez-vous.

De quelle mani�re proc�dez-vous? Le but est d'encourager les collaborateurs � agir comme des "intrapreneurs". Il s'agit donc de les inciter � identifier, � analyser et � exploiter les opportunit�s d'am�liorer les prestations de leur organisation. Avant d'impl�menter dans l'entreprise ce "management by opportunity", nous analysons d'abord les conditions cadres. Celles-ci doivent comprendre notamment un certain nombre de m�canismes susceptibles de lubrifier la machine comme, par exemple, une personne responsable de l'innovation interne. Car la culture d'intrapreneurship va au-del� de la seule gestion participative.

Lorsque les conditions-cadres sont adapt�es, nous formons alors les cadres moyens-sup�rieurs durant deux � quatre jours, afin de leur donner les outils n�cessaires pour concr�tiser ce processus d'innovativit�. La suite est entre les mains de l'entreprise qui doit assurer le suivi � l'interne. S'il y a besoin d'un accompagnement externe, nous pouvons l'assurer. Mais en aucun cas, nous ne tenons � devenir des consultants externes. Il faut que l'entreprise vive son innovation de mani�re autonome.

Est-ce � dire que l'intrapreneurship ne concerne pas les employ�s?

Non, nous formons aussi les employ�s � cette d�marche, mais selon des modalit�s compl�mentaires.

Quelles sont les limites de l'intrapreneurship? La direction doit �tre pr�te � accepter les r�gles du jeu, notamment le droit � l'erreur. Heureusement, une bonne utilisation des outils du "management by opportunity" emp�che les erreurs graves.

Qu'attendez-vous d'un �v�nement comme ce First Tuesday consacr� � l'intrapreneurship? Des �changes d'exp�riences intrapreneuriales, pouvoir apprendre de toutes les personnes pr�sentes et, bien s�r, encourager les personnes et les entreprises � utiliser l'intrapreneurship comme moyen de d�veloppement. Il est aussi int�ressant de noter que la plus grande partie des expos�s pr�sent�s ce soir mettent en valeur des exp�riences au niveau des services, et non pas des produits. Car, l'intrapreneurship c'est aussi une vari�t� de mod�les: la Banque Cantonale de Gen�ve op�re une mutation culturelle pour encourager les comportements intrapreneuriaux; le site e-sider.com est, par contre, une intraprise � l'int�rieur de la Banque Cantonale Vaudoise; Agilent a d�lib�r�ment choisi, au moment du spin-off de HP, d'�tre engag�e culturellement sur la voie intrapreneuriale. Ces deux derniers cas sont totalement diff�rents des mod�les qui ne modifient pas leurs structures de base. Autrement dit, je souhaite que ce First Tuesday contribue � redonner un peu de tonus entrepreneurial en Suisse.

Les intrapreneurs s'expriment au First Tuesday

Dans le cadre des First Tuesday, un s�minaire est organis� ce soir � Gen�ve sur le th�me de "l'intrapreneurship: pour innover et entreprendre dans les grandes organisations". Des experts et des praticiens confrontent leurs success stories pour faire le point sur les derniers d�veloppements permettant de stimuler les comportements entrepreneuriaux dans les grandes et moyennes entreprises, ainsi que les administrations publiques. Le panel verra s'exprimer Blaise Goetschin, CEO de la Banque Cantonale de Gen�ve, Robert Pucci, DRH et Compensation & Benefits Director Manager chez Agilent Technologies Europe, Alfonso von Wunshchheim, CEO de e-sider.com (BCV), le professeur Beno�t Leleux du S. Schmidheiny Professor of Entrepreneurship and Finance, et Rapha�l Cohen, directeur du Certificat en entrepreneurship/intrapreneurship de l'�cole des HEC de Gen�ve.

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